Entre la vie et la mort : un troisième état !

Publié le 20 novembre 2024 à 17:51
lit d'hôpital sur de l'herbe

Un « troisième état » : une découverte qui redéfinit les frontières de la vie et de la mort

Des chercheurs en biologie cellulaire viennent de révéler l’existence d’un état cellulaire inédit, un état qui se situe entre la vie et la mort. Jusque-là, la science considérait deux états principaux dans le cycle cellulaire : vivant, où les cellules sont en activité et contribuent à l’organisme, et mort, où les cellules cessent de fonctionner. Cette nouvelle découverte, qualifiée de « troisième état », bouleverse cette dichotomie. Selon les recherches menées par le professeur Peter Noble de l'Université de Washington et Alex Pozhitkov du centre médical City of Hope en Californie, certaines cellules, même après la mort clinique de l’organisme, ne meurent pas immédiatement et continuent d’exercer des fonctions vitales. Elles s’auto-organisent et s’adaptent, formant parfois des structures multicellulaires qui n'existaient pas auparavant, telles que les xénobots.

Les cellules qui entrent dans cet état intermédiaire adoptent des comportements inhabituels et adaptatifs, marquant ainsi une phase de transition qui pourrait redéfinir ce que signifie « être en vie ». Selon Noble et Pozhitkov, cette découverte repousse les limites de la biologie actuelle et ouvre la porte à une nouvelle compréhension du cycle cellulaire et de la biologie du vivant.

Xénobots et anthrobots : des cellules capables d’auto-organisation après la mort

Un aspect fascinant de cette découverte est l’observation des « xénobots » et « anthrobots », des cellules qui, bien qu’appartenant à des organismes morts, se montrent capables d'auto-organisation. Les xénobots, formés à partir de cellules cutanées de grenouilles mortes, développent des structures multicellulaires qui se déplacent et interagissent avec leur environnement. Ils utilisent des cils pour se mouvoir, montrant ainsi un comportement que l’on pourrait associer à des organismes vivants.

Parallèlement, les anthrobots représentent une autre forme d’auto-organisation, observée dans des cellules humaines, notamment des cellules pulmonaires. Ces cellules sont capables non seulement de se mouvoir, mais également de réparer les cellules endommagées autour d’elles. Dans certains cas, ces anthrobots peuvent même contribuer à la régénération tissulaire, un potentiel qui pourrait révolutionner les traitements en médecine régénérative.

Potentiel en médecine régénérative : vers une nouvelle génération de thérapies

Les applications médicales de cette découverte sont vastes et prometteuses. La médecine régénérative, domaine en plein essor, pourrait bénéficier des capacités des cellules post-mortem à se réorganiser et à effectuer des réparations ciblées. Imaginez des traitements où ces cellules sont programmées pour circuler dans le corps humain, réparant des tissus endommagés ou éliminant des accumulations nuisibles, comme les plaques artérielles dans le cas de l’athérosclérose ou le mucus dans les poumons de patients atteints de mucoviscidose.

Ces cellules pourraient être utilisées comme des « robots biologiques », remplaçant les matériaux synthétiques comme le plastique et le métal par des matériaux entièrement biodégradables et adaptés au corps humain. Ces robots biologiques, à la fois innovants et écologiques, pourraient un jour permettre de créer des traitements médicaux personnalisés qui réduisent les risques de rejet par l'organisme, améliorant ainsi la prise en charge des patients.

Les mécanismes en jeu : la survie cellulaire après la mort de l'organisme

La capacité des cellules à survivre et à s’auto-organiser après la mort d’un organisme repose sur des mécanismes complexes. Parmi les facteurs influençant cette survie figurent la température, la disponibilité en énergie et la composition biochimique de l’environnement cellulaire. Par exemple, dans des conditions optimales, les cellules semblent utiliser leurs réserves d’énergie pour maintenir des circuits internes de communication, un processus que les chercheurs pensent être similaire à une sorte de « persistance électrique ».

D’autres variables jouent également un rôle, telles que l’âge de l’organisme, son état de santé au moment du décès, ainsi que la nature spécifique de ses tissus. Certaines cellules pourraient être plus résistantes et mieux équipées pour survivre temporairement après la mort de l'organisme, expliquant pourquoi elles continuent de fonctionner et de communiquer entre elles via des signaux bioélectriques. Ces signaux permettent une coordination entre cellules, même lorsque l'organisme global est considéré comme « mort ».

Redéfinir la mort légale : des implications pour la médecine légale et les soins post-mortem

Si certaines cellules continuent de fonctionner après la mort, cela pourrait avoir des implications profondes pour notre compréhension de la mort en termes juridiques et médicaux. Actuellement, la « mort légale » est souvent déterminée par l’arrêt des fonctions cérébrales et cardiaques. Or, si certaines cellules montrent des capacités de survie et d’auto-organisation au-delà de ce point, cette notion de mort pourrait être remise en question. En effet, la présence de ce « troisième état » pourrait pousser à revoir les critères de diagnostic de la mort et les pratiques associées aux soins post-mortem.

Les implications pratiques sont également notables : les cellules post-mortem qui entrent dans cet état pourraient être prélevées à des fins thérapeutiques avant de perdre leur vitalité, permettant de les utiliser dans des traitements de médecine régénérative. Cela pourrait ainsi transformer les soins en fin de vie, ouvrant la voie à des innovations médicales et à une nouvelle éthique autour de la fin de vie et des prélèvements d'organes.

Défis éthiques : manipuler des cellules entre vie et mort

Les possibilités offertes par cette découverte viennent aussi avec des enjeux éthiques. Manipuler des cellules post-mortem pour en faire des « robots biologiques » ou des agents de réparation pose des questions sur les frontières de la vie et de la mort. Ces cellules, bien qu’issues d’organismes morts, agissent d’une manière qui rappelle celle de cellules vivantes. Cette caractéristique conduit à des interrogations éthiques et philosophiques : jusqu’où peut-on aller dans l’exploitation de cellules « mortes » ? Quelle est la différence entre ce type de manipulation et les modifications génétiques réalisées sur des cellules vivantes ?

Les anthrobots et xénobots, bien que créés à partir de cellules mortes, sont programmés pour se décomposer après une période, ce qui pourrait rassurer en termes de sécurité environnementale et de durabilité. Cependant, la capacité de ces cellules à s’organiser et à se réparer pose des questions sur le statut de ces entités, qui ne sont ni complètement vivantes ni totalement inertes.

Une révolution en biologie : explorer l’inconnu

Cette recherche pionnière ouvre de nouvelles perspectives sur notre compréhension de la biologie et des fonctions cellulaires. Elle dévoile un domaine encore largement inexploré de la vie, un espace qui se situe au croisement de la biologie cellulaire, de la médecine, et de l’éthique. Les scientifiques s’intéressent désormais à des questions fondamentales qui pourraient modifier la perception même de l’existence biologique. Dans ce domaine émergent, de nombreuses interrogations restent sans réponse, mais les recherches en cours promettent d’approfondir notre connaissance de ce « troisième état » et d’ouvrir des voies pour des applications concrètes en santé humaine.

En conclusion, les travaux de Peter Noble et d’Alex Pozhitkov marquent une avancée majeure dans le domaine de la biologie cellulaire. Leur découverte d'un « troisième état » entre la vie et la mort apporte non seulement une compréhension plus nuancée de la survie cellulaire post-mortem, mais elle laisse également entrevoir des applications médicales et thérapeutiques révolutionnaires, tout en invitant à une réflexion éthique profonde sur le statut des cellules après la mort de l'organisme. À suivre de près, car cette frontière entre la vie et la mort pourrait bien être la clé de nombreuses innovations en médecine et en biotechnologie dans les années à venir.